Fado
tropical
C.
Buarque, R. Guerra
Oh, musa do meu fado, Oh minha mãe gentil, Te deixo consternado No primeiro abril. Mas não sê tão ingrata, Não esquece quem te amou, E em tua densa mata Se perdeu e se encontrou. Ai, esta terra ainda vai cumprir seu ideal, Ainda vai tornar-se um imenso Portugal !
Sabe,
no fundo eu sou um sentimental.
Todos
nós herdámos no sangue lusitano uma boa dosagem de lirismo (além
da sífilis, é claro).
Mesmo
quando as minhas mãos estão ocupadas
em
torturar, esganar, trucidar, meu coração fecha
os
olhos e sinceramente chora…
Com avencas na caatinga, Alecrins no canavial, Licores na moringa, Um vinho tropical. E a linda mulata, Com rendas do Alentejo, De quem, numa bravata, Arrebato um beijo! Ai, esta terra ainda vai cumprir seu ideal…
Meu
coração tem um sereno jeito
E as minhas mãos o golpe duro e presto, De tal maneira que, depois de feito, Desencontrado, eu mesmo me contesto.
Se
trago as mãos distantes do meu peito
É que há distância entre intenção e gesto E se o meu coração nas mãos estreito, Me assombra a súbita impressão de incesto.
Quando
me encontro no calor da luta
Ostento a aguda empunhadora à proa, Mas meu peito se desabotoa.
E
se a sentença se anuncia bruta
Mais que depressa a mão cega executa, Pois que senão o coração perdoa. Guitarras e sanfonas Jasmins, coqueiros, fontes, Sardinhas, mandiocas, Num suave azulejo ! E o rio Amazonas Que corre Trás-os-montes, E numa pororoca, Deságua no Tejo ! Ai, esta terra ainda vai cumprir seu ideal
Ainda
vai tornar-se um império colonial…
|
Fado
tropical
Trad JP Caudrec
Ô,
muse de mon fado,
Ô, ma douce mère, Je te quitte consterné En ce premier avril. Mais sois pas si ingrate, Oublie pas celui qui t’a aimée, Et qui dans ton épaisse forêt S’est perdu et s’est retrouvé. Ah, cette terre va encore réaliser son idéal, Elle va devenir un jour un immense Portugal !
Tu
sais, au fond, moi je suis un sentimental. On a tous hérité du
sang lusitanien une bonne dose de lyrisme (en plus de la syphilis,
bien sûr).
Même
lorsque mes mains sont occupées à torturer, tourmenter,
trucider, mon cœur ferme les yeux et pleure sincèrement…
Avec de la fougère dans la savane, Du romarin dans les champs de canne, Liqueurs dans le cruchon, Un vin tropical. Et la belle mulâtresse, Et ses dentelles d’Alentejo, À qui, par bravade, J’arrache un baiser ! Ah, cette contrée va encore réaliser son idéal…
J’ai
le cœur serein par nature
Et
mes mains frappent vite et dur
De
sorte que, après l’action,
Déboussolé,
je me remets en question.
Si
j’ai les mains loin du cœur,
C’est
qu’il y a loin de l’intention au geste
Et
si entre mes mains j’étreins mon cœur
Je
suis troublé par la soudaine impression d’inceste.
Quand
je me retrouve au cœur de la mêlée
Je
dégaine et j’empoigne la rapière,
Mais
ma poitrine se desserre.
Et
si la sentence sans ambages est prononcée
La main aveugle exécute sans attendre
Car
sans cela le cœur se laisse prendre.
Mandolines et flonflons
Jasmins,
cocotiers, fontaines
Sardines,
manioc
Sur
un doux zellige !
Et
l’Amazone
Qui
coule outre monts
Dans
un mascaret
Se
jette dans le Tage !
Ah,
cette contrée va encore réaliser son idéal
Elle
va devenir un jour un empire colonial… |
Fado
tropical
est,
à mon avis, une bonne chanson
de Chico Buarque,
expression concrète d’un métissage culturel et ode à la
fraternité lusophone de part et d’autre de l’Océan. Dans les
premiers temps j’ai cru que c'était un chant d’espoir adressé
en hommage aux Capitaines d’Avril lors de la Révolution aux
œillets car c’est ainsi que me l’ont présentée les amis
portugais en 1975, lors de mon premier retour au Portugal libéré.
J’en avais profité cet été-là pour acheter le LP Chico
canta
sur lequel était enregistrée cette chanson avec une douzaine
d’autres petits joyaux. De retour en Bretagne, loin de l’euphorie
de l’été brûlant de 75 à Lisbonne, je "matais la
saudade" en écoutant le disque du matin au soir et je me
suis rendu compte alors que le sens du texte ne correspondait pas à
l’explication qui m’en avait été donnée. En y regardant de
plus près, j’ai pu lire sur la pochette que le copyright de
première publication du disque datait de 1973, soit une année avant
le soulèvement du MFA au Portugal. Je m’étais déjà laissé dire
que de la voix poétique à la voix prophétique la distance était
mince mais, malgré la vénération que je vouais à Chico, il
faudrait me l’expliquer patiemment pour me convaincre.
Au
fil du temps, bien avant Internet, j’ai peu à peu appris, qu’à
l’origine, Fado
tropical
est l’un des thèmes d’une comédie musicale composée en 1972,
par Chico Buarque de Holanda et Ruy Guerra, cinéaste mozambicain,
pièce destinée à être représentée au théâtre et intitulée
Calabar
l’éloge de la trahison.
A
cette époque, les artistes et créateurs brésiliens sont
tributaires de l’indispensable autorisation de la commission de
censure instaurée par le pouvoir militaire, plus féroce et
sourcilleuse encore, s’il en était besoin, depuis la promulgation
de l’Acte institutionnel N°5 (A.I. 5) en décembre 1968 (il ne
sera abrogé qu’en 1979), par lequel le Brésil passe de fait de la
ditabranda
à la ditadura.
Fin 1972, l’autorisation de représentation de Calabar
fut refusée. Néanmoins, l’édition du texte ainsi que du disque
et des chansons qui l’accompagnent sont autorisés, sous réserve
de quelques coups de ciseaux. Malgré
cela, quelques jours après le lancement, les premiers albums édités
sont retirés des bacs des disquaires sur ordre du Régime au
prétexte que le titre de l’album était Chico
Canta Calabar,
initiales CCC en majuscules, allusives aux sinistres Comandos
de Caça aos Comunistas,
milices
qui
déjà en 1968 avaient fait irruption dans un théâtre de São Paulo
et tabassé les membres de la troupe lors de la représentation d’une
pièce du même Chico Buarque, Roda
viva.
L’album ressortira quelques temps plus tard avec le titre raboté,
Chico
canta.
Pour
ces raisons,
Fado
tropical
connaîtra au Brésil un succès très confidentiel jusqu’à ce
que, au Portugal, la suppression de la censure dès le 25 avril 74
permette sa diffusion sur les ondes libérées. Alors, Fado
tropical
contribuera à sa manière à la liesse et à l’émotion
collective. Et c'est là que surgit le malentendu. Mais revenons às
raízes
e às
matrizes.
Le
thème de Calabar
évoque un chapitre intéressant de l’Histoire du Brésil :
l’installation des Hollandais dans la région du Nordeste, de 1630
à 1654, et les efforts des Portugais pour les en expulser. Sans
entrer dans les détails superflus, il faut rappeler qu’en 1580
une crise
de succession dynastique
contraint
le Portugal à sceller une union avec
l'Espagne : Philippe II porte les deux couronnes d’Espagne et
du Portugal et, de ce fait, la colonie Brésil passe aussi dans
l’escarcelle espagnole. La réunion des deux royaumes, connue sous
le nom d’Union
ibérique,
dure jusqu’en 1640, mais leurs institutions restent séparées.
Les
Pays-Bas (Provinces
unies) arrachent leur indépendance vis-à-vis de l'Espagne en 1581,
ce qui va conduire Philippe II à interdire le commerce avec leurs
navires, y compris au Brésil. Les Hollandais bravent l’interdit et
en 1630, après avoir subi de sérieux revers à Salvador, ils vont
tenter de s’installer durablement dans la région de Recife malgré
la résistance du gouverneur portugais de Pernambouc, Mathias de
Albuquerque. L’Histoire officielle a retenu que les Hollandais ont
été aidés en cela par la désertion providentielle d’un homme
jusque là engagé aux côtés d’Albuquerque, le métis Domingos
Fernandes Calabar qui connaissait bien le terrain ainsi que les
points faibles de la défense portugaise. Au bout de deux ans les
Hollandais contrôlent la longue bande de côte la plus accessible
aux Européens, et l’arrivée de Maurice de Nassau, gouverneur
envoyé par la Compagnie hollandaise des Indes Occidentales, va
conforter la présence batave. Recife est rebaptisée Mauritsstad /
Cidade
Maurício.
Pour
la fin de l’histoire, le déserteur Calabar sera repris par
Albuquerque et condamné à être pendu puis écartelé, sentence qui
sera exécutée sans délai.
On
a pu voir dans cet épisode l’illustration de l’un des
mythes fondateurs du Brésil, dans la mesure où les trois principaux
groupes humains qui composent le substrat de la nation brésilienne
sont alliés et unis pour déloger les intrus venus des Pays-Bas ;
dans la pièce, les éléments indigène, européen et africain sont
respectivement incarnés par Felipe Camarão, indien converti par les
jésuites, Mathias de Albuquerque, gouverneur portugais et l’esclave
affranchi Henrique Dias. Le métis Calabar représente quant à lui
la figure du félon et du renégat. Or, à travers ce personnage,
c’est le mythe que Chico Buarque et Ruy Guerra ont voulu remettre
en cause, en complétant le titre éponyme : Calabar, l’éloge
de la trahison.
A
ce sujet, Chico Buarque confie que
« Calabar,
l'éloge de la
trahison, posait la
question de la colonisation. Nous avions énormément
travaillé, avec Ruy Guerra,
pour essayer de cerner au mieux cet épisode de l'histoire
brésilienne, quand deux
puissances coloniales, le Portugal et la Hollande,
s'affrontaient dans le Nordeste pour la possession
d'une terre qui ne leur appartenait pas. Calabar représente
dans l'histoire officielle du Brésil la figure du traître à
la patrie. Métis originaire de Pernambouc,
il déserta, passa
à l'ennemi et fut exécuté en 1635. Certains disent
que la colonisation hollandaise aurait apporté au Brésil
plus de bienfaits que l'autre. Mais toute colonisation
a un côté positif et un côté négatif. Les Portugais
avaient la vue courte ; ils furent toujours trop timorés,
trop prudents, trop hésitants. Ils ont fait
beaucoup de tort à la future nation brésilienne, en
interdisant l'ouverture d'universités, par exemple. Mais
ils possédaient une très grande faculté d'intégration, due
à leur propre mélange, entre Maures, Européens du Nord... Ce sont
eux qui nous ont transmis la faculté du métissage. Nous sommes le
produit de cette générosité
portugaise, de cette vision à la fois rétrécie et
planétaire.»
Stefan
Zweig affirme avec pertinence que « dans cette guerre entre
Portugais et Hollandais, un élément nouveau est apparu pour la
première fois, élément dont les forces et les particularités sont
encore inconnues : le Brésilien ».
Et,
après ce long préambule, quel rapport y a-t-il avec notre propos ?
Il faut pour cela nous pencher brièvement sur le texte et y déceler
quelques indices.
Le
titre Fado Tropical attire l’attention : ce n'est pas
un authentique oxymore toutefois l'association des deux termes n’est
pas naturelle. Chaque élément nous renvoie à des espaces
géographiques distincts.
Le
terme fado nous situe au Portugal, plus précisément à Lisbonne et
nulle part ailleurs. Dans le contexte historique de la pièce, le
fado est un anachronisme ; il est possible que cette expression
musicale métissée ait poussé son premier cri sur la terre du
Brésil dans la seconde moitié du XIXème.
En réalité, le fado, le vrai, est né sur la mer, les mers
sillonnées par les navires portugais, entre Afrique, Amérique et
Portugal ; le fado a le goût du sel et des larmes, le fado n'a pu
s'épanouir qu'à Lisbonne, au bord du Tage, point de départ de
l'aventure et fin du rêve accompli. L'origine du mot serait fatum,
passé du verbe latin fari :
ce qui est écrit, qui
a aussi donné en français fatal,
fatidique etc
Il
n’empêche que le fado est devenu un élément identitaire du
Portugal de l’Etat nouveau, le Portugal de Salazar. Et jusqu’aux
années 70 le fado est un chant défaitiste, conformiste et résigné,
au mieux un spectacle pour touristes, au pire l’expression
aliénante d’une complaisance coupable pour le régime qui opprime
le peuple portugais depuis 40 ans. Il n’est pas bien vu d’aimer
le fado dans ces années-là. On me le faisait savoir sans détours.
Un
fado tropical, à première vue, pourrait être un type de fado parmi
les quelques dizaines de lignes mélodiques reconnues (fado vitória,
fado tango, fado corrido etc) à partir desquelles le fadiste
improvise et module au gré de son inspiration et de ses aptitudes
vocales. Mais, que je sache, le fado tropical n’en fait pas partie.
Le
mot tropical nous renvoie donc à un autre espace
géographique, à celui de l’extension/expansion coloniale
portugaise. Pour l’anecdote, l’un des chapitres d’un livre
fondamental, Racines du Brésil (1936), écrit par Sérgio
Buarque de Holanda, le propre père de Chico, s’intitule : Le
Portugal et la colonisation des terres tropicales. Le terme était
assez en vogue en 1973 puisque, quelques années auparavant, un autre
chanteur populaire, Jorge Ben, avait composé une chanson intitulée
País tropical, dans laquelle il énumérait sur un rythme de
samba un certain nombre de lieux communs sur le style de vie des
classes moyennes cariocas ; et à la fin des années 60, après
publication d’un disque collectif intitulé Tropicália, un
mouvement culturel qui va bouleverser le paysage de la MPB, va éclore
sous le nom de Tropicalisme. On peut y entrevoir également
une inspiration de la théorie du « lusotropicalisme »
établie par Gilberto Freyre (Maîtres et Esclaves, 1933, 1952
pour la première édition française). Ce concept, récupéré et
travesti par le salazarisme, correspond à l’idée d’un
impérialisme "à la portugaise", selon lequel
la colonisation portugaise était portée par un esprit humaniste et
civilisateur plus que par la cupidité, le profit et l’exploitation.
S’agissant
d’une chanson, le texte se compose de trois couplets et d’un
refrain. Mais, s’agissant d’une comédie musicale, il comprend
aussi deux passages non chantés, le second sous la forme d’un
sonnet dit par Albuquerque dans lequel il exprime cyniquement, et non
sans humour, son sens de l’efficacité dans l’action.
Les
deux premiers vers ont une structure identique, avec en anaphore
l’interjection vocative oh
qui
interpelle
la muse inspiratrice et la mãe
gentil.
Pour le premier vers l’invocation
de la muse, associée à une métrique traditionnelle, le vers
heptasyllabe ou redondilha
maior,
rappelle bien entendu la poésie classique, médiévale ou de la
Renaissance. L’adjectif gentil,
pourrait rappeler également l'Alma
minha gentil
de
l’un
des plus célèbres sonnets de Camoens, en réalité l’auditeur
brésilien reconnaîtra sans équivoque l’exaltation de la mère
patrie dans un passage de l’hymne national adopté en 1922 :
Dos
filhos deste terra és mãe gentil
Ô
pátria amada Brasil
L’invocation
de la muse sur un ton suranné et niais, autant que l’évocation de
l’hymne national constituent des anachronismes cocasses ;
l’humour, tantôt subtil, tantôt féroce et même égrillard, est
un élément constant de la pièce.
Le
troisième vers a été le point de départ de mes premières
interrogations de 1975 : o
1° abril.
Que vient faire ici le premier avril pour un hymne aux héros du 25
avril ? La réponse viendra bien plus tard lorsque je fis
part de mes doutes à une amie brésilienne :
-
Le premier avril est le lendemain du 31 mars, me répondit-elle,
persuadée de m’avoir éclairé.
-
Non, sans blague ? Tem certeza ?
-
Pois é, meu querido, c’est la date du coup d’état de 1964,
ajouta-t-elle, suspectant de sérieuses carences dans la formation
lusitaniste de son interlocuteur.
Plus
tard encore j’apprendrai que le coup d’état a bien eu lieu dès
les premières heures du premier avril mais la junte militaire a
flairé le piège : une "glorieuse révolution" le
jour des blagues, des farces et des mensonges ça ne fait pas
sérieux. Ici encore l’Histoire officielle impose sa version des
événements : il est décrété que le coup d’état aura eu
lieu le 31 mars, précieux futur antérieur qui permet de tricher
avec le temps. Dès lors nous ne sommes plus dans le contexte du
conflit luso-hollandais de 1630 mais dans celui de la dictature
militaire qui, à partir de 1964, et plus encore en 1968-69, va
persécuter, emprisonner, exiler. Et pour les consciences que ça
pourrait heurter, le slogan est clair : « Brasil, ame-o ou
deixe-o », le Brésil tu l’aimes ou tu le laisses. C'est la
référence historique de Te
deixo consternado.
Trois ans plus tard G. Gil reprendra ce thème pour le show Os
mais doces bárbaros
en inversant le sens du mot d’ordre : O
seu amor ame-o e
deixe-o...
livre
para amar, brincar, correr, ser o que ele é…
J'ai aussi découvert au fil des ans que ce slogan n'était pas
propre au Brésil. Il serait né au Etats-Unis. Et à l'aube du
XXIème
siècle, je l’ai entendu d’une certaine droite française,
recroquevillée dans la naphtaline, nostalgique de la francisque et
dévote du goupillon, à l'adresse des étrangers incomplètement
intégrés : "La France, tu l'aimes ou tu la quittes!".
Les
vers suivants confirment l’ambivalence des contextes historiques et
des protagonistes :
-
le découvreur qui s’est attaché à la nouvelle terre, a su
l’apprivoiser malgré ses angoisses et ses frayeurs face à une
nature, certes généreuse, mais opaque et mystérieuse (densa
mata),
paradis terrestre ou enfer vert. « Si le paradis terrestre
existe quelque part, il ne peut être loin d’ici » se serait
exclamé Amérigo Vespucci, débarqué en 1501, un an après Cabral.
-
l’exilé politique de la fin des années 60, contraint de quitter
son pays, sa patrie bien aimée,
Mas
não sê tão ingrata,
Não esquece quem te amou,
Não esquece quem te amou,
Sans
regret ni remord pour la syntaxe maltraitée de rustre colon
portugais (não sê au lieu de não sejas, esquece pour
esqueças), l’exilé, à l’heure des adieux, renié par sa
mère-patrie, supplie cette marâtre de ne pas l’oublier. Cette
déclaration d’amour filial à la terre-mère indigne rappelle
d’autres compositions de Chico Buarque tout aussi déchirantes sur
l’exil forcé (il a lui-même été contraint à l’exil à
Rome en 1969-70) : Samba de Orly, Meu caro amigo...
Les
deux vers du refrain présentent aussi une construction parallèle
qui rappelle celle des deux premiers vers du premier couplet, avec
l’interjection ai, complainte courante du fado nostalgique
embué de saudade, expression de douleur, d’impuissance ou de
regret, regret du non-accompli, complétée par l’emploi itératif
de l’adverbe ainda associé au futur proche vai (vai
cumprir, vai tornar-se). Cette construction annonce sur un ton
d’ironie caustique, autant que de lassitude, toute la potentialité
de ce sempiternel "pays du futur", jamais réalisé,
récurrente dans l’histoire du pays au destin prometteur (destin =
fado !).
Ai,
esta terra ainda vai cumprir seu ideal
Ainda
vai tornar-se um imenso Portugal
Ce
refrain peut s’entendre de plusieurs façons :
-
Sous l’angle luso-tropicaliste d’abord et encore, selon lequel le
dessein de la colonisation portugaise est d’édifier, d’élever
avant d’exploiter (cumprir seu ideal). L’arrivée de six
jésuites un siècle plus tôt (1549) permettait d’augurer de cette
mission, si l’on en croit Stefan Zweig : « C’est
pourquoi, ce que les Jésuites considèrent comme le plus important,
c’est de construire des écoles, dans lesquelles, voyant très
loin, ils commencent leur idée du mélange systématique qui a fait
l’unité du Brésil et a, seule, maintenu cette unité… En
réalistes rigoureux et clairvoyants ils sont les seuls qui ont eu la
vision véritable du Brésil en formation … et ils ne s’écartent
pas, au fil des siècles, de leur but ultime : formation de ce
pays dans l’esprit d’une seule religion, d’une seule langue,
d’une seule idée ». Rappelons aussi qu’en 1630, la terre
du Brésil est en devenir, à peine explorée, seule la côte est
exploitée ; les premiers bandeirantes, autre mythe
fondateur du Brésil, avaient à peine pénétré l’intérieur
du pays imenso. Serait-ce aussi la perception d'un pays
métissé, comme l'a été le Portugal ainsi que l'a souligné fort
justement Chico Buarque ? (Voir plus haut)
-
Si en revanche on se place dans le contexte de l’après coup
d’état, vai tornar-se um imenso Portugal / Um império colonial
présage un devenir aussi sombre pour le Brésil que pour le
Portugal puisque, bien entendu, en 1972-73 ce dernier est encore
bâillonné et, de plus, englué dans une guerre coloniale qui
sacrifie sa jeunesse (4 ans de service militaire, dont deux dans la
brousse africaine) et compromet l’avenir du pays. Le dictateur
Salazar a été écarté du pouvoir en 1968, victime d’une lésion
cérébrale mais son successeur désigné, Marcelo Caetano mène la
même politique de « défense des vraies valeurs de
l’Occident ».
La
deuxième et la troisième strophes représentent une série de
tableaux dans lesquels se rejoignent, se confondent et se fondent des
éléments de paysages, flore, orographie, art de vivre de l’un et
l’autre pays. L’absence de verbes en fait un portrait plutôt
statique (comme sur un suave azulejo), plutôt convenu et si
chargé de poncifs que l’ironie affleure, mais le tableau est
paisible, figé et hors du temps comme le Portugal voulu et imposé
par Salazar. Seule l’évocation discrète de la mulata à
qui Albuquerque arrache un baiser peut rappeler le comportement
dévoyé des colons européens et leur domination par le sexe et le
viol des femmes indiennes, africaines, métisses. Selon Stefan Zweig
encore : « Ce qui était réprimé dans leur pays par
la chaîne et la marque, était considéré ici comme plaisir permis,
selon la doctrine des conquistadors Ultra equinoxialem non
peccatur », il n’y a pas de péché au-delà de la ligne
d’équinoxe, ou équateur. Cette maxime inspirera à Chico Buarque
l’un des titres les plus drôles et les plus ébouriffants de
l’album, Não existe pecado ao sul do equador, qui connaîtra
le succès cinq ans plus tard grâce à une version disco
interprétée, à sa manière, par Ney Matogrosso et deviendra le
thème musical de la telenovela Pecado rasgado.
Comme
nous l’avons vu plus haut, le texte de Fado tropical inclut
également deux parties parlées pendant lesquelles l’accompagnement
musical demeure d’une grande sobriété, guitarra e viola,
c’est-à-dire guitare portugaise et guitare classique. La première,
en forme de coeur et au son cristallin, proche de la mandoline,
compte douze cordes (2x6) pincées ; c’est l’instrument
indispensable à l’accompagnement du fado. Le choix de ces deux
seuls instruments par le compositeur donne à la chanson toute sa
force expressive, sa capacité à émouvoir et lui confère un gage
d’authenticité.
Dans
la première partie parlée, Mathias Albuquerque s’adresse de toute
évidence à quelqu’un sur le ton de la confidence : sabe,
no fundo… Dans la pièce, l’interlocuteur est Frei Manoel, en
présence d’Henrique Dias et Felipe Camarão qui picorent les
restes du repas du gouverneur. Le ton est grave mais le choix et le
choc des mots, d'un petit cœur qui pleure tandis que les
mains sont occupées à torturer, sont d’un effet comique
désarmant, effet confirmé par l’évocation de l’héritage
lusitanien, du lyrisme à la syphilis. Sur l’album de 1973 ce mot a
été coupé de la bande son.
Dans
le sonnet, le gouverneur, guidé par le souci de l’efficacité et
ruminant sa vengeance contre Calabar, justifie son recours à la
violence malgré un naturel paisible (Meu coração tem um sereno
jeito), violence nécessaire pour rester maître, garder la main
(Pois que senão o coração perdoa). Sur le fond,
l’effet comique s’estompe en apparence même si la polysémie du
troisième tercet comporte, selon moi, une connotation paillarde. En
outre, à la fin de la séquence où est insérée cette chanson, les
indications scéniques et les répliques entre Mathias et le chef
hollandais qui vient d’entrer, relèvent de l’humour graveleux et
carrément scatologique lorsqu’ils évoquent et comparent les
effets de leurs dérangements intestinaux chroniques contractés sous
ces latitudes.*
Voilà,
à grands traits, le sens de cette chanson. Mais alors, où est le
malentendu ?
Un
concours de circonstances a entraîné une confusion, voire un total
contresens, sur le contenu du message délivré par les auteurs à
l’heure de sa réception au Portugal. Fado
tropical
appartient au registre de la chanson populaire (genre mineur pour les
mineures disait Gainsbourg), mais par sa composition elle n’est pas
une chanson populaire. S’il existait une classification de chanson
érudite, elle pourrait y prétendre. Nous venons de le voir, le sens
du texte ne se révèle pas à la première audition et il
s’accommode mal d’une écoute distraite sur une radio
commerciale. Néanmoins, sa diffusion fréquente sur les ondes
portugaises dans la liesse post-25 avril 74 a pu séduire par
l’accompagnement musical, "très à la façon" du
Portugal, par la juxtaposition et la fusion des éléments portugais
et brésiliens, par l’emploi, même une seule fois, du mot avril,
par l’évocation ambiguë de la sensibilité, certains diront de la
sensiblerie, du cœur portugais, voire la cordialité de l'homme
brésilien, en opposition à la brutalité des régimes qui les
oppriment (on sait que Salazar était en communion d’idées avec le
fascisme italien et le nazisme, mais leur brutalité lui répugnait),
autant d’éléments qui pourraient expliquer que cette chanson ait
été accueillie par l’immense majorité des Portugais comme un
geste de sympathie, de fraternité indéfectible, un message de
solidarité et d’union avec le MFA etc. Ce message sera
effectivement adressé en 1975 par Chico Buarque avec la chanson
Tanto
mar.
Rappelons-nous également qu’en
France dès 1974 Georges Moustaki a publié une chanson intitulée
Portugal, qui est l’exacte adaptation musicale de Fado
tropical mais dont le contenu est radicalement transformé et
transposé dans le contexte du 25 avril portugais. J’ai pu voir il
y a quelques jours, dans le capharnaüm de Youtube, une vidéo
intitulée Fado tropical sur laquelle défilent des images qui
illustrent le texte de G. Moustaki (répression au Chili et en
Espagne, images de Franco, de Pinochet et de Nixon, victoire du MFA
au Portugal…) avec pour fond sonore la version originale chantée
par Chico Buarque !
Plus près de
nous, en 2007, le cinéaste espagnol Carlos Saura a présenté le
dernier volet de sa trilogie consacrée aux musiques et danses
populaires intitulée Fados (après Flamenco, 1995
et Tango, 1998). A mon sens ce film est un raté total, c’est
dommage pour le fado, et je crains que Saura n’ait jamais compris,
et ne comprendra jamais, l’âme du fado, il ferait même croire aux
moins avertis que le fado se danse. Mais ce qui m’a le plus
surpris, et même agacé, (me deixou consternado !), est la séquence
où Chico Buarque interprète Fado tropical (lequel
n'appartient pas, répétons-le, au registre traditionnel du fado
castiço), sur un fond d’images tournées à Lisbonne en
avril 1974. Ici les strophes non chantées sont récitées par Carlos
do Carmo que certains désignent comme le "pape du fado" !
Pourquoi Chico Buarque a-t-il accepté si complaisamment ce montage
grotesque ? Lassitude et résignation face aux circonstances qui
ont contrarié un succès populaire de Calabar ? Je
l’ignore.
Pour l'heure, je
laisse la conclusion à Chico Buarque soi-même :
«Vous savez, le
Brésil et le Portugal ont une relation
un peu difficile. Nous voyons toujours le Portugal avec une
certaine prudence, une certaine réserve,
si ce n'est avec ironie. Les fados composés par
les Brésiliens - comme celui qui est chanté par Mathias,
- l'ont
été sur le thème de la
parodie. On imite "l'accent", on se moque... Les Portugais
sont nos Belges. C'est peut-être une vengeance,
pour inverser le rapport entre le colonisé et
le colonisateur. Une manière de se délivrer d'une agressivité
ancestrale. Mais il y a certainement un contenu plus social, car les
blagues portugaises mettent en scène
des gens humbles, toute cette vague d'immigrants
venus au Brésil au début du siècle pour des motifs
économiques. (…) Je ne saurais relire aujourd'hui
Calabar :
cette pièce est
comme congelée, fossilisée. La censure l'a interdite. Elle
m'a obligé à couper des mots dans les chansons etc. Calabar
fut donnée pour la
première fois vers 1980, lors de la libéralisation du régime
militaire, à São Paulo, mais
je pensais déjà à autre chose.»
Gardons-nous
de nous laisser berner par ces propos vains et désabusés du "velho
Francisco" ; Fado
Tropical est bien
plus drôle et autrement plus subtil qu’une histoire belge !
Notes
Les
propos de Chico Buarque entre guillemets sont empruntés à l’ouvrage
de Véronique Montaigne Sons latinos, (1999)
Les
citations de Stefan Zweig sont extraites de Le
Brésil, Terre d’avenir (1941,
édition française 1981)
*
Dans la version éditée de Calabar,
on peut lire l’indication scénique suivante :
“NO
DECORRER DO SONETO, MATHIAS FOI DESABOTOANDO AS CALÇAS E,
ARRIANDO-AS. AGORA, PARA A ÚLTIMA PARTE DO FADO, ELE VAI-SE SENTANDO
NA LATRINA AO LADO DO HOLANDÊS, QUE PERMANECE NA PENUMBRA”
Et pendant que se chante le
dernier couplet :
“LUZ SOBRE OS DOIS. MATHIAS
USA UMA CEROULA VERMELHA COM FAIXA VERDE : O HOLANDÊS EMPUNHA UMA
BANDEIRA BRANCA ESPETADA NUM BAMBU ; SUAS CEROULAS SÃO AZUIS
LISTRADAS DE VERMELHO ... MATHIAS CAGA ; ALIVIADO, SOLTA UM LONGO
SUSPIRO.”
Suit
le dialogue :
H – Sente-se melhor ?
M – Melhor ? O senhor não
faz ideia do que seja...
H – Eu ? saiba que estou
nesta campanha há tanto tempo quanto o senhor, Governador.
M (fraternal) – Também
pegou ?
H – Já trouxe das Índias
orientais.
M – É. Parece que são
terríveis por lá.
H – Nem pode imaginar ...
M – Mas as daqui não ficam
atrás.
H – Maneira de dizer...
M – Ficam ?
H – A bem da verdade, a
minha já é um resultado meio híbrido. Às vezes é a indiana que
me ataca. Bem cedinho. A brasileira geralmente vem quando a outra
está de recesso (começa a se contorcer). Falou no bicho ? ...
(caga)
M (olhando no vaso do outro) –
das boas...
H (conferindo) – Geralmente
é mais amarelada ...
M – Tem vários matizes. A
minha é um arco-íris.
H – Que sorte.
M – Sorte ?
H – Onde há cor nem tudo
está perdido (evocativo). O senhor já esteve na Holanda ?
M – Não.
H – Então não sabe o que é
um campo de tulipas ao entardecer ...
M
– E o senhor já viu as amendoeiras em flor ? Etc
!
PORTUGAL
(Georges
Moustaki, 1974)
Ô
muse ma complice
Petite sœur d’exil
Tu as les cicatrices
D’un 21 avril
Mais ne sois pas sévère
Pour ceux qui t’ont déçue
De n’avoir rien pu faire
Ou de n’avoir jamais su
À ceux qui ne croient plus voir s’accomplir leur idéal
Dis leur qu’un œillet rouge a fleuri au Portugal
On crucifie l’Espagne
On torture au Chili
La guerre du Viêt-Nam
Continue dans l’oubli
Aux quatre coins du monde
Des frères ennemis
S’expliquent par les bombes
Par la fureur et le bruit.
À ceux qui ne croient plus voir s’accomplir leur idéal
Dis leur qu’un œillet rouge a fleuri au Portugal
Pour tous les camarades
Pourchassés dans les villes
Enfermés dans les stades
Déportés dans les îles
Ô muse ma compagne
Ne vois-tu rien venir
Je vois comme une flamme
Qui éclaire l’avenir
À ceux qui ne croient plus voir s’accomplir leur idéal
Dis leur qu’un œillet rouge a fleuri au Portugal
Débouche une bouteille
Prends ton accordéon
Que de bouche à oreille
S’envole ta chanson
Car enfin le soleil
Réchauffe les pétales
De mille fleurs vermeilles
En avril au Portugal
À ceux qui ne croient plus voir s’accomplir leur idéal
Dis leur qu’un œillet rouge a fleuri au Portugal
Et cette fleur nouvelle qui fleurit au Portugal
C’est peut-être la fin d’un empire colonial
Petite sœur d’exil
Tu as les cicatrices
D’un 21 avril
Mais ne sois pas sévère
Pour ceux qui t’ont déçue
De n’avoir rien pu faire
Ou de n’avoir jamais su
À ceux qui ne croient plus voir s’accomplir leur idéal
Dis leur qu’un œillet rouge a fleuri au Portugal
On crucifie l’Espagne
On torture au Chili
La guerre du Viêt-Nam
Continue dans l’oubli
Aux quatre coins du monde
Des frères ennemis
S’expliquent par les bombes
Par la fureur et le bruit.
À ceux qui ne croient plus voir s’accomplir leur idéal
Dis leur qu’un œillet rouge a fleuri au Portugal
Pour tous les camarades
Pourchassés dans les villes
Enfermés dans les stades
Déportés dans les îles
Ô muse ma compagne
Ne vois-tu rien venir
Je vois comme une flamme
Qui éclaire l’avenir
À ceux qui ne croient plus voir s’accomplir leur idéal
Dis leur qu’un œillet rouge a fleuri au Portugal
Débouche une bouteille
Prends ton accordéon
Que de bouche à oreille
S’envole ta chanson
Car enfin le soleil
Réchauffe les pétales
De mille fleurs vermeilles
En avril au Portugal
À ceux qui ne croient plus voir s’accomplir leur idéal
Dis leur qu’un œillet rouge a fleuri au Portugal
Et cette fleur nouvelle qui fleurit au Portugal
C’est peut-être la fin d’un empire colonial
TANTO
MAR
Sei que estás em festa
pá
Fico contente
E enquanto estou
ausente
Guarda um cravo para
mim
Eu queria estar na
festa pá
Com tua gente
E colher pessoalmente
Uma flor do teu jardim
Sei que há léguas a
nos separar
Tanto mar, tanto mar
Sei também quanto é
preciso pá
Navegar, navegar
Lá faz primavera pá
Cá estou doente
Manda urgentemente
Algum cheirinho de
alecrim
TANTO
MAR 2
Foi bonita a festa pá
Fiquei contente
E inda guardo,
renitente
Um velho cravo para mim
Já murcharam tua festa
pá
Mas certamente
Esqueram uma semente
Nalgum canto do jardim
Sei que há léguas a
nos separar
Tanto mar, tanto mar
Sei também quanto é
preciso pá
Navegar, navegar
Canta a primavera pá
Cá estou carente
Manda novamente
Algum cheirinho de
alecrim
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VASTE
MER
Je sais que c’est la fête chez
toi mec
Je suis content
Même si je ne suis pas là
Garde un œillet pour moi
Je voudrais être à la fête mec
Chez toi
Et cueillir moi-même
Une fleur de ton jardin
Je sais que des lieues nous
séparent
Tant de mer, vaste mer
Je sais aussi combien il faut
Naviguer, naviguer
Là-bas c’est le printemps mec
Ici je suis malade
Envoie-moi d’urgence
Un petit parfum de romarin
VASTE
MER 2
Ce fut une belle fête mec
Ça m’a plu
Et je garde encore obstinément
Un vieil œillet pour moi
La fête et tes œillets sont
fanés mec
Mais ils ont dû certainement
Oublier une graine
Dans un petit coin du jardin
Je sais que des lieues nous
séparent
Tant de mer, vaste mer
Je sais aussi combien il faut
Naviguer, naviguer
Chante le printemps mec
Ici je suis en manque
Envoie-moi à nouveau
Un petit parfum de romarin
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Hino
Nacional Brasileiro
Ouviram
do Ipiranga as margens plácidas
Deitado
eternamente em berço esplêndido,De um povo heróico o brado retumbante, E o sol da Liberdade, em raios fúlgidos, Brilhou no céu da Pátria nesse instante. Se o penhor dessa igualdade Conseguimos conquistar com braço forte, Em teu seio, ó Liberdade, Desafia o nosso peito a própria morte! Ó Pátria amada, Idolatrada, Salve! Salve! Brasil, um sonho intenso, um raio vívido De amor e de esperança à terra desce, Se em teu formoso céu, risonho e límpido, A imagem do Cruzeiro resplandece. Gigante pela própria natureza, És belo, és forte, impávido colosso, E o teu futuro espelha essa grandeza Terra adorada, Entre outras mil, És tu, Brasil, Ó Pátria amada! Dos filhos deste solo és mãe gentil, Pátria amada, Brasil! Ao som do mar e à luz do céu profundo, Fulguras, ó Brasil, florão da América, Iluminado ao sol do Novo Mundo! Do que a terra mais garrida Teus risonhos, lindos campos têm mais flores; "Nossos bosques têm mais vida", "Nossa vida" no teu seio "mais amores". Ó Pátria amada, Idolatrada, Salve! Salve! Brasil, de amor eterno seja símbolo O lábaro que ostentas estrelado, E diga o verde-louro desta flâmula - Paz no futuro e glória no passado. Mas, se ergues da justiça a clava forte, Verás que um filho teu não foge à luta, Nem teme, quem te adora, a própria morte! Terra adorada Entre outras mil, És tu, Brasil... |
Les
berges paisibles de l'Ipiranga ont
entendu
L'appel retentissant d'un peuple héroïque. Et le soleil de la liberté, de ses rayons fulgurants, A brillé dans le ciel de la Patrie en cet instant. Si nous avons conquis cette égalité Par la force de nos bras, En ton sein, ô Liberté, Notre courage défiera même la mort ! Ô, Patrie bien-aimée, Adorée Salut, Salut Brésil, un rêve intense, un rayon vivifiant, D'amour et d'espérance descend sur la terre, Si dans ton ciel superbe, souriant et limpide, L'image de la Croix du Sud resplendit. Géant par ta nature même, Tu es beau, tu es fort, intrépide colosse, Et ton avenir reflète cette grandeur. Terre adorée, Entre mille autres, C’est toi Brésil, Ô, Patrie bien-aimée ! Des enfants de ce sol, tu es la douce mère, Patrie bien-aimée, Brésil !
Éternellement
étendu dans un berceau splendide,
Au son de la mer et à la lumière du ciel infini, Tu resplendis, ô Brésil, fleuron de l'Amérique, Illuminé par le soleil du Nouveau Monde ! Tes beaux champs joyeux ont plus de fleurs
Que
les terres les plus charmantes,
"Nos forêts ont plus de vie", "Notre vie" en ton sein "plus d'amours". Ô, Patrie bien-aimée, Adorée Salut, Salut ! Brésil, que l’étendard étoilé que tu arbores
Soit
le symbole d'amour éternel,
Tu
es Brésil...Que le vert et or de cette flamme proclame : Paix pour l'avenir et gloire au passé. Mais si tu brandis le glaive de la justice, Tu ne verras aucun de tes enfants fuir le combat, Ni même, celui qui t'adore, craindre la mort ! Terre adorée, Entre milles autres, |